Artigos - Postado em: 10/06/2014

(Français) La nouvelle loi Anti-Corruption

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Utilisée comme une solution politique par le gouvernement fédéral en réponse aux manifestations populaires de 2013, la Loi n. 12.846- publiée le 1er aôut 2013, nommée « Loi Anti-corruption » est entrée en vigueur le 29 Janvier 2014, au milieu de controverses. Cependant, elle a pour objectif de modifier la pratique des affaires au Brésil.

   Nonobstant son caractère immédiat, la Loi vise à répondre aux engagements internationaux pris par le Brésil. La « Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers », de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) est un exemple de ce compromis. Cette Convention a été signée à Paris en 1997.

   Même si populairement connue comme « Loi anti-corruption », cette nouvelle Loi ne se limite pas à des actes liés à la corruption. L’article 5 démontre l’intention légale de couvrir tous les comportements « contre les biens publics nationaux ou étrangers, contre des principes de l’administration publique ou concernent les engagements internationaux pris par le Brésil ».

   Par conséquent, l’article 5 de ladite Loi possède un vaste champ d’application. En d’autres termes, les actes cités dans cet article ne representent pas une liste exhaustive. Ainsi, tous les faits commis qui seraient considérés comme préjudiciables à la fonction publique sont susceptibles de punition, aussi bien dans le domaine administratif que judiciaire.

   La Loi ne vise qu’à responsabiliser – civilement et administrativement – la personne morale, et non pas les directeurs, employés et/ou fonctionnaires qui seraient impliqués dans la corruption. Pour les personnes physiques, reste la possibilité d’application des sanctions prévues par d’autres lois concernant également des infractions de même nature. A titre d’exemple, le droit brésilien applique la « Loi sur la faute administrative », la « Loi sur les appels d’offres et des contrats administratifs » et ou encore le « Code Pénal » dans ces cas.

   Cependant, en ce qui concerne les actionnaires et les gérants de société, ceux-ci  être soumis à la Loi Anti-corruption, dans l’hypothèse où un juge détermine « la levée du voile social de la personne morale ». Ce qui pourrait arriver tant dans les procédures administratives que judiciaires. De cette manière, les biens personnels des actionaires ou des gérants pourraient être atteints lorsque la société est utilisée pour faciliter, dissimuler ou masquer un comportement illicite.

   Contrairement à ce qui se passe avec les personnes physiques, subjectivement tenues pour responsables de leur conduite, la personne morale devient responsable des actes objectivement nuisibles pratiqués« selon leur intérêt ou bénéfice propre».De cette façon,que ce soient les sociétés dites « empresárias » ou les sociétés dites « simples »,personnifiées ou pas, les associations, les fondations, les sociétés étrangères dont le siège, filiale ou représentation au Brésil, ainsi que les sociétés brésiliennes qui opèrent à l’étranger, pourraient être tenues responsables par cette nouvelle Loi.

   Toutefois, cette Loi précise que la responsabilité de la personne morale est objective. Cela veut dire que la personne morale pourrait être responsable civilement ou administrativement sans qu’il soit nécéssaire de prouver l’existence d’une volonté ou faute de la société à l’origine de l’acte préjudiciable à l’administration publique.

   Aussi, la simple survenance d’un fait portant préjudice à l’Administration Publique, liée à une personne morale,aurait comme incidence la responsabilisation de ladite société. Il en sera ainsi, par exemple, lorsqu’un employé, de son plein gré, corrompt un fonctionnaire public pour obtenir un quelconque bénéfice pour l’entreprise, sans l’autorisation ou le consentement de celle-ci.

Le juriste brésilien, Marçal Justen Filho¹,illustre bien cette position :

« il existe une présomption absolue lorsque la personne a impliqué l’entreprise au travers d’une conduite corrompue, cette action sera le résultat de défaut d’une organisation et de gestion ».

   Cela a été, en fait, le point le plus controversé de la Loi Anti-corruption. De nombreuses entreprises interprètent, par exemple, qu’elles ne devraient pas être tenues responsables dans les cas suivants : i) si l’entreprise a adopté tous les mécanismes disponibles pour empêcher et combattre la corruption ; et ii)s’il a été possible de prouver que l’acte de corruption a découlé d’un comportement isolé d’un salarié de ladite entreprise.

   La nouvelle loi a consideréles hypothèses mentionnées ci-dessus uniquement comme des circonstances atténuantes (article 7) en ce qui concerne l’application de la sanction de l’entreprise. Cela veut dire que, lors du calcul du quantum de la peine, une sanction moins sévère serait appliquée en raison des politiques de gouvernance mises en œuvre dans l’entreprise. Ces règles s’appellent « politiques de compliance ».

   Dans ce contexte, si quelque acte illicite a été constaté, l’organisme lui-même pourra engager un procès administratif à caractère punitif, dans lequel le droit à la défense de l’entreprise est garanti. A la fin de la phase d’investigation, étant constatée par les juges une violation de la loi anti-corruption, l’entreprise pourra se voir condamner aux sanctions suivantes :

  • Une amende, d’un montant de 0,1% à 20% des revenus bruts de l’entreprise, en fonction de la gravité de l’acte. Si ces critères ne peuvent être appréciés, l’amende pourrait varier entre R$ 6.000,00 et R$ 60 millions ; et
  • Publication de la décision qui la condamne, en utilisant un véhicule médiatique d’audience générale. Cela serait une manière de dénigrer l’image de l’entreprise sur le marché.

   Un autre point très critiqué à la Loi concerne l’absence de volonté de créer des organismes administratifs spécifiques aux fins d’instruire et de juger les fautes constatées. Le contenu actuel permet l’adoption de compétence répartie pour l’instruction et le jugement lors des procès administratifs. Cette carence pourrait conduire à des décisions administratives dont le fondement juridique ne serait pas des plus appropriés, voire à l’application de sanctions disproportionnées et même de décisions politiques.

   Cette situation est inquiétante et pose de réelles difficultés pour les entrepreneurs. En outre,rien n’empêcheque l’entreprise condamnée administrativement tente de faire réviser les peines apliquées par le Pouvoir Judiciaire.

   Conformément à ladite Loi, la responsabilité administrative n’exclut pas la responsabilité judiciaire,dans laquelle les entreprises peuvent se voir attribuer des peines plus sévères. Les peines seraient:

  • La perte de biens, droits ou valeurs obtenus frauduleusement ;
  • La suspension ou l’interdiction partielle des activités ;
  • La dissolution obligatoire de la personne morale (peine la plus sévère) ;
  • L’interdiction de recevoir des incitations, subsides, subventions ou donations d’organismes ou entités publiques pour une période de 1 à 5 ans.

   La sévérité des sanctions, alliée à la responsabilité objective de la personne morale, inévitablement conduira à l’adoption de politiques de « compliance » plus efficaces par les entreprises qui opèrent au Brésil et à l’étranger.

   D’ailleurs, beaucoup d’entre elles ont déjà fait d’importants investissements à fin d’établir : la création ou la révision de leurs codes de conduite et d’éthique ; la création ou la révision des canaux de plaintes internes ; la réalisation d’investigations régulières pour trouver des violations ; la réalisation des activités de formation et des audits internes et externes ; l’introduction de systèmes et procédures informatiquespour la gestion et le contrôle des contrats administratifs.

   Comme cela sera certainement vérifiable, les entreprises auront un rôle centralde la lutte contre la corruption au Brésil, puisqu’elles seront incitées à prendre des mesures efficaces pour la prévention des fautes prévues dans la loi.

   A ce titre, le législateur a prévu la possibilité d’invoque l’« Acordo de Leniência » (l’accord de Clémence) entre la personne morale et l’autorité administrative compétente Cette solution serait une sorte de « délation récompensée » connue en Droit Administratif.

   Grâce à « l’accord de clémence », l’entreprise qui a réalisé un acte répréhensible pourrait collaborer aux investigations menées administrativement. Cette coopération permettrait l’identification d’autres parties impliquées dans l’infraction. Cela aussi rendrait plus facile l’obtention des informations et des documents pour affiner l’administration de la preuve dans les cas jugés.

   Comme résultat de cet accord, l’entreprise serait exemptée des sanctions de «publication extraordinaire dans les médias » et « d’interdiction de recevoir des prêts, incitations, subsides, subventions, ou donations du Pouvoir Public ». Elle pourrait, encore, bénéficier de la réduction de l’amende jusqu’aux 2/3 (deux tiers). Il existe également la possibilité d’atténuation ou même d’exemption de sanctions prévues dans la Loi relative auxappels d’offreset contrats administratifs (Loi n. 8.666/93).

   Enfin, le législateur prévoit la création de CNEP « Cadastro Nacional de Empresas Punidas » (Registre national des entreprises punis). La fonction de ce Registre estde faire connaître les sanctions imposées aux entreprises par les organismes fédéraux, les États fédérés comme par les municipalités.

   La Loi n ° 12.846/13 a déjà été réglementée par les États de São Paulo(Décret n °. 60.106/2014), de Paraná(Décret n °. 10.271/2014) et Tocantins (Décret n°. 4.954/2013). Très bientôt, la Loi sera également soumise à une réglementation par le Pouvoir Exécutif Fédéral.

   Cette nouvelle Loi Anti-Corruption, par conséquent, comble une lacune dans la législation brésilienne sur la responsabilité des personnes morales pour des actions nuisibles à l’Administration Publique. Elle coexiste avec d’autres normes, comme la Loi sur la faute administrative, la nouvelle « Lei do CADE », la Loi sur les appels d’offres et contrats administratifs et la législation pénale.

Felipe Alves Pacheco – avocat de l’équipe de Droit Public.

[1]JUSTEN FILHO, Marçal.A “Nova” Lei Anticorrupção Brasileira (Lei Federal 12.846). Informatif Justen, Pereira, Oliveira e Talamini, Curitiba, n.º 82, décembre 2013, disponible au site web: http://www.justen.com.br/informativo, acesse le 26/02/2014.

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